En électricité, il y a deux grandeurs typiques à retenir : l’intensité du courant et la tension électrique. Ces deux paramètres sont au cœur de toute la théorie électrique et sont à prendre en compte dans tous les circuits électriques.
L’intensité du courant, mesurée en ampère (A), correspond au nombre d’électrons qui passent dans le circuit : il s’agit donc d’une mesure directe de la quantité de courant qui passe.
La tension se mesure en volt (V) et peut se traduire par la force des électrons ou la pression qui pousse les électrons à travers un circuit. Plus la tension est grande, plus les électrons sont forcés à travers le circuit.
Bien-sûr, il existe des appareils pour mesurer ces deux grandeurs électriques. Leur emploi est généralement vu à l’école, et l’on apprend alors qu’un ampèremètre se place en série dans le circuit alors qu’un voltmètre se place aux bornes du circuit.
Malheureusement, les explications s’arrêtent souvent ici et l’on ne dit donc pas pourquoi il faut brancher les instruments comme ça.
La réponse à ce pourquoi réside déjà dans la nature de ce qu’on mesure, et du coup également dans le fonctionnement de ces appareils.
Les ampèremètre et voltmètre numériques sont des versions électroniques des appareils analogiques à aiguille utilisés autrefois : c’est de ces vieux appareils que je veux parler ici, car ce sont ceux dont le fonctionnement est le plus facile à comprendre et est le plus intéressant.
L’ampèremètre
Les ampèremètre mesurent l’intensité du courant dans un circuit. Ils donnent une indication sur le nombre d’électrons qui passent à travers un fil donné. Or, pour voir ce qui passe dans un fil, il faut l’ouvrir. Ceci explique pourquoi un ampèremètre doit être branché en série avec les autres composants : il doit faire parti du circuit. D’ailleurs, on dit qu’un ampèremètre mesure « le courant qui le traverse ».
Les ampèremètres, pour être de bonne qualité, doivent donc avoir une résistance interne la plus faible possible, pour ne pas bloquer le courant qu’il tente de mesurer et donc pas non plus influencer le reste du circuit. Si certains ampèremètres à fort calibre utilisent justement l’effet Joule (et donc la résistance interne de l’appareil) pour mesurer la déformation d’un ressort sous l’effet de la chaleur, la plupart des ampèremètres fonctionnent de façon magnétique.
On appelle parfois ces derniers des galvanomètre, en référence à Luigi Galvani, son inventeur. Dans un galvanomètre, on utilise le fait qu’un courant traversant un fil produit aussi un champ magnétique. Si vous avez déjà vu l’aiguille d’une boussole être dévié à proximité d’un fil électrique traversé par un courant, c’est de ça que je parle.
Le galvanomètre utilise exactement ce principe : l’importance de la déviation de l’aiguille de la boussole est directement liée à l’intensité du courant traversant le fil.
Le galvanomètre est alors une bobine placée entre deux aimants et à laquelle on a fixé une aiguille. Le courant passe à travers la bobine, produit un champ magnétique et c’est la bobine qui tend à s’orienter dans le champ magnétique. Plus l’intensité du courant est important, plus le bobine s’incline en entraînant l’aiguille. Un ressort retient l’ensemble et permet de repositionner la bobine dans son orientation au repos.
On le voit très bien sur cette photo :
En utilisant un fil de faible résistance pour la bobine, on réduit l’influence de l’ampèremètre dans le reste du circuit et on améliore la précision de la mesure.
Dans d’autres modèles, la bobine est fixe et c’est un morceau de ferrite monté sur ressort qui est mobile. En augmentant l’intensité su courant, ce ferrite est attiré d’autant plus par la bobine et il dévie l’aiguille de l’appareil.
L’ampèremètre permet ici de mesurer une intensité. Employé astucieusement, il permet aussi de mesurer… une tension ! C’est l’objet de ce qui suit.
Le voltmètre
Le voltmètre permet de mesurer la tension aux bornes d’un circuit ou d’une portion du circuit. Le voltmètre ne fait pas partie du circuit : il n’y a pas « tension traversant le circuit ». Les branchements du voltmètre fonctionnent plutôt comme une sonde que l’on place à deux endroit du circuit et qui permet de mesurer la tension entre ces deux points. C’est là la raison pour laquelle on le branche en dérivation du circuit.
L’ampèremètre, qui est placé dans le circuit, doit avoir une résistance minimale afin de ne pas bloquer le courant qu’il tente de mesurer. Le voltmètre, branché en dérivation par rapport au circuit, doit au contraire avec une résistance la plus élevée possible : ceci pour ne pas permettre au courant de quitter le circuit principal.
En effet, si le courant traversait facilement le voltmètre, ce dernier se comporterait comme un fil. Or la tension aux bornes d’un fil et nulle et le voltmètre ne mesurerait pas de tension. Là encore, il s’agit donc de ne pas fausser sa propre mesure et de ne pas non plus altérer le fonctionnement du circuit étudié.
Dans les voltmètres à aiguille, la résistance est de quelques centaines de kiloohms. C’est déjà pas mal, mais un voltmètre numérique récent comporte une résistance de l’ordre de 10 mégaohms, ce qui est assez conséquent : si on mesure la tension aux bornes d’une pile (1,5 V), le courant fuitant dans le voltmètre ne serait que de quelques nanoampères, ce qui serait totalement acceptable.
Pour leur fonctionnement, il faut qu’un petit courant traverse le voltmètre. Ce courant doit être faible, on l’a vu, mais il doit être là : en effet, c’est ce faible courant qui permet de faire la mesure et de déplacer l’aiguille.
Le problème devient alors de relier une intensité à une aiguille qui bouge, autrement dit… une mesure d’intensité ! Ceci est résolu avec un milliampèremètre.
Un voltmètre est donc tout simplement un ampèremètre très sensible en série avec une résistance de très grande valeur. La résistance est là pour empêcher un courant trop fort de passer, et le milliampèremètre dévie l’aiguille. Si l’on connaît la valeur de la résistance et en mesurant l’intensité du courant qui passe à travers, alors une simple loi d’Ohm permet de donner la tension aux bornes du voltmètre.
Sur cette photo d’un voltmètre, on distingue très clairement les mêmes éléments que dans l’ampèremètre de la photo précédente :
Et les multimètres modernes ?
De nos jours, les appareils magnifiques ci-dessus ne sont plus utilisés.
On préfère utiliser des multimètres qui font à la fois voltmètre et ampèremètre (et bien plus) : plus compacts, précis, robustes, et avec une gamme de fonctionnement bien plus large, ils sont largement préférés. Les appareils analogiques sont alors relégués aux musées.
Dans ces appareils, la fonction ampèremètre est en réalité un voltmètre : l’intensité est alors obtenue par une loi d’Ohm sur une résistance de très faible valeur.
Si les vieux voltmètre sont en fait des ampèremètres en série avec une résistance, il est amusant de noter que les nouveaux ampèremètre sont en réalité des voltmètre avec une résistance très petite !
Ceci s’explique par le fait qu’il est simple de mesurer une intensité de façon magnétique avec une aiguille, mais plus simple de mesurer une tension de façon électronique.
Que ce soit en analogique ou en numérique, donc, on cherche à mesurer la grandeur qu’il est possible de mesurer, et ensuite de relier cette grandeur à celle que l’on souhaite mesurer, par l’intermédiaire d’un composant tiers, en l’occurrence, une résistance de valeur précisément connue.
Enfin, il existe également des pinces ampèremétriques : il suffit de passer la pince autour d’un câble et un afficheur vous donne l’intensité du courant. Ces pinces curieuses fonctionnent grâce à l’effet Hall, et feront l’objet d’un article à part sur ce blog.