On trouve dans le commerce (liens en bas de l’article) des ventilateurs pour poêles à bois censés améliorer le réchauffement de votre maison.
Quelque soit le type de chauffage, l’air chaud est moins dense que l’air froid, en conséquence de quoi il monte, stagne au niveau du plafond et vous n’en profitez pas beaucoup.
Avec un ventilateur, l’air chaud au dessus du poêle est mélangé avec le reste de l’air et on obtient de l’air tiède partout dans la pièce et augmentant nettement le confort. De plus, ça vous évite d’avoir à chauffer comme un malade et permet donc de faire des économies (jusqu’à 30 % selon les sources) :

N’importe quel ventilateur fonctionne pour faire ça, mais premièrement ça peut faire du bruit, et deuxièmement le ventilateur consomme du courant.
Avec les ventilateurs présenté ici, il n’y a rien à brancher : il s’agit juste d’un socle à poser directement sur un poêle. Quand ce dernier est chaud, la chaleur remonte le socle, alimente un petit moteur et fait tourner le ventilateur.
L’objet de cet l’article est de décrire le fonctionnement de ces ventilateurs mystérieux : comment un appareil sans piles et sans branchements peut faire tourner un ventilateur électrique ?
Transformer la chaleur en mouvement ?
Dans ces appareils, c’est directement la chaleur du poêle qui provoque la mise en rotation du ventilateur. Il n’y a pas de pile ni de branchement à faire. La source d’énergie est le poêle lui-même.
Je connais 3 méthodes pour obtenir ça de façon aussi compacte : le moteur de Stirling, le moteur au Nitinol et le module Peltier.
Avec un moteur de Stirling
La première méthode est le moteur de Stirling : c’est un moteur thermique qui se met à tourner quand on réchauffe une de ses faces. Certains modèles tournent rien qu’avec la chaleur de la main, d’autres fonctionnent au dessus d’une tasse de café. Dans l’industrie, il en existe même qui produisent du courant électrique avec la chaleur obtenue par un concentrateur solaire.
J’ai un article dédié sur le moteur de Stirling, son fonctionnement et tout le reste : le moteur de Stirling miniature.
Le principal avantage de ce système est le bon rendement : l’énergie thermique est directement utilisé, sans passer par un moteur électrique. L’inconvénient c’est qu’il ne tourne pas très vite et que chauffer davantage ne le forcera pas à tourner plus vite, au delà d’une limite.
Bien qu’il existe des ventilateurs de poêle utilisant un moteur de Stirling (à des fins de démonstration plus que d’utilisation), ce n’est pas ce système qui est utilisé ici.
Avec un moteur au Nitinol
Une deuxième méthode possible serait d’utiliser un moteur au Nitinol, un alliage nickel-titane. Je présente cet alliage et ce moteur dans mon article sur le Nitinol.
Dans ce cas, il s’agit d’utiliser les propriétés de mémoire de forme du Nitinol.
L’idée est d’utiliser quelque chose comme ça :
Le Nitinol, ici bouclé et donc courbée, tend à se raidir sous l’effet de la chaleur. De ce fait, quand il est trempé dans de l’eau chaude, il tire sur le fil. Si on initie le moteur en le faisant tourner, le fil plonge dans l’eau chaude et se raidit d’un côté et sort puis se relâche de l’autre. Ceci permet d’avoir un côté de la boucle qui est tirée en bas et l’autre tirée vers le haut, ce qui suffit à faire tourner la boucle et la roue.
On pourrait utiliser ce système pour faire tourner notre ventilateur. L’idéal serait de mettre un petit réservoir d’eau pour améliorer la conduction thermique. Le problème de ce système est que cela ajoute pas mal de pièces tournantes, et donc de l’usure et du bruit. De plus, il faut surveiller le niveau de liquide en bas.
C’est donc possible, mais pas l’idéal non plus.
Avec un module Peltier
La dernière méthode utilise un composant électronique appelé un « module Peltier ». Il s’agit généralement d’une plaque de 5 cm × 5 cm et de quelques millimètres d’épaisseur :

La source du fonctionnement du module Peltier est un peu compliquée, je vous invite à lire mon article qui l’explique en détail : produire de l’électricité avec de la chaleur : comment fonctionne un module Peltier ?.
Ce module, quand on l’alimente voit une face se réchauffer et l’autre se refroidir. Le plus souvent, c’est le côté froid qui est mis à profit (le côté chaud est alors ventilé) : c’est avec ça que fonctionnent les mini-frigos USB ou les réfrigérateurs de camping.
Ces modules ont une autre particularité : au lieu de produire du chaud et du froid quand on l’alimente, il est possible de faire l’inverse, à savoir produire du courant quand on réchauffe un côté et refroidit l’autre !
Ce système est par exemple utilisé dans les sondes spatiales lorsque des panneaux solaires ne peuvent pas être utilisés. Une source au plutonium (naturellement et continuellement chaude) réchauffe un côté. L’autre côté est exposé au froid du vide sidéral. Le module produit alors un courant électrique continu.
Ces mêmes modules — sans le plutonium — sont utilisés dans les ventilateurs pour poêles. La chaleur du poêle réchauffe le côté chaud et l’air de la pièce suffit à refroidir le côté froid. La différence de température est suffisante pour produire un courant électrique qui alimente alors le ventilateur électrique.
Ce système a l’avantage d’être très silencieux et totalement autonome : dès que le poêle est chaud, la chaleur commence à réchauffer le socle puis un côté du module Peltier. Quand le courant produit par le module est suffisant, le ventilateur se met à tourner, brasser de l’air chaud et à réchauffer votre pièce de façon efficace.
Le ventilateur sert également en aspirer de l’air frais pour refroidir l’autre face du module Peltier (sans quoi les deux faces finissent à la même température et il ne produit plus de courant).
Conclusion
Les ventilateurs pour poêle sont rempli de sciences.
Sous leur apparence magique (ils sont totalement dénués de mécanique) se cache en réalité un concentré de physique : on peut y voir de la thermodynamique, des semi-conducteurs, de la physique des matériaux, mais aussi de l’électromagnétisme et de l’électricité dans le moteur, sans oublier la dynamique des fluides pour le ventilateur.
Certains modèles utilisent même un bilame sous le socle qui soulève la base quand la chaleur est trop grande (permettant alors de ventiler le socle et de réduire l’échauffement), un composant à l’origine utilisé dans les clignotants de voitures !
Bref, ce genre de gadget est un de ces trucs que j’aime : il fonctionne de façon passive et autonome, est joli à voir, ne consomme rien et en plus il est utile car il réchauffe la maison et fait faire des économies. Parfait pour l’hiver qui s’en vient.
Liens
Pour ma part j’ai fabriqué le miens (photo d’en-tête) d’après un concept existant mais plus commercialisé (voir le premier commentaire sous l’article), mais on peut en trouver en ligne. Il suffit de chercher « ventilateur pour poêle ».
Perso je l’ai découvert sur Amazon, où l’on en trouve de plusieurs formes :
Quant au moteur de Stirling miniature, pour ceux qui marchent avec la chaleur d’une tasse de café, c’est par ici chez Amazon ; pour ceux qui tournent directement sur la main (mais beaucoup plus cher) c’est sur stirlingengine.co.uk ou chez The American Stirling Company.
Amusez-vous !
image d’en-tête : travail personnel.