Un faisceau laser vert sur une lentille de verre.

Cet article fait partie d’une série d’articles sur la lumière.
Bien que ce ne soit pas nécessaire pour comprendre cet article, je vous en conseille la lecture si le sujet vous intéresse :

J’ai déjà expliqué pourquoi la lumière ralentit passant dans l’eau ou dans un autre milieu. J’aurais pu commencer par un autre point qui revient souvent, à savoir : pourquoi la lumière se propage en ligne droite ?

C’est vrai : que l’on parle de la loi de Descartes, de la déviation de la lumière dans l’eau, ou de la finitude de la vitesse de la lumière (les articles sont à venir), on part d’un postulat très simple mais fondamental : un rayon de lumière se propage en ligne droite.

Dans le cadre corpusculaire, où la lumière est une particule nommée photon, il est simple de comprendre pourquoi la lumière se propage en ligne droite : la particule est simplement en mouvement, et elle conserve son mouvement par inertie, n’ayant aucune raison de changer de direction puisqu’aucune force ne vient la dévier.

Dans le cadre ondulatoire, par contre, la raison est un peu plus complexe, et c’est ça que je chercherai à expliquer ici.

Le faisceau lumineux

Un rayon de lumière ne se propage jamais seul. On ne peut pas vraiment définir ce qu’est un rayon de lumière : si l’on fait ça, autant considérer un photon directement. En général, on considère un faisceau de lumière, c’est-à-dire un ensemble de rayons qui se suivent, issues de la même source et avec une direction identique.

C’est dans un faisceau lumière que les différents rayons, les différentes ondes, interfèrent et se comportent de façon très intéressante.

Interférences entre les rayons

J’en ai déjà parlé dans l’article sur le ralentissement de la lumière dans l’eau ou verre, mais quand plusieurs ondes lumineuses se retrouvent au même endroit, ils interfèrent.
Une onde lumineuse constitue une perturbation du champ électromagnétique et qui se déplace. Quand deux perturbations se croisent, elles s’additionnent. Or, cette perturbation oscille entre valeurs positives et négatives, par conséquent, quand elles s’additionnent, elles peuvent aussi s’annuler :

Interférences d’ondes.
La courbe bleue représente la somme des courbes rouge et verte. Cette somme peut-être supérieure aux deux courbes, inférieure, et même complètement nulle dans le cas où les deux ondes rouge et verte sont identiques mais en opposition de phase.

Dans le dernier cas, les deux ondes (rouge et verte) ne sont pas nulles mais leur somme l’est. La perturbation électromagnétique de l’une annule complètement la perturbation de l’autre. C’est donc comme si deux sources de lumière éclairaient indépendamment mais produisaient une absence de lumière si elles étaient utilisées simultanément.

Ceci est vrai pour toutes les ondes, y compris sonores. C’est comme ceci que les casques anti-bruit actifs fonctionnent : un micro capte le bruit ambiant, détecte les fréquences, et un petit haut-parleur envoi ensuite un son identique mais déphasé dans l’oreille. Les deux sons s’annulent et l’on n’entend plus le bruit.

Interférences de rayons d’un même faisceau

Dans un faisceau de rayons identiques parallèles et rectilignes issus de la même source monochromatique (par exemple un laser), tous les rayons sont identiques et superposables. La somme de ces rayons produit donc une interférence additive : plein de « petits » rayons forment un faisceau très lumineux :

Interférences additives.
Tous les rayons interfèrent de façon additive et forment un seul faisceau puissant.

Bien-sûr, ceci se produit car tous les rayons se propagent à la même vitesse et ont la même forme. Si un des rayons se propage moins vite, les pics et les creux sur l’onde accumulent du retard et peuvent se retrouver décalées par rapport à une autre onde, au moins à certains endroits.

On se retrouve alors dans le cas d’une interférence destructive : la somme des ondes devient nulle.

Évidemment, dans un milieu homogène (l’air, le verre, l’eau, le vide…) tous les rayons d’un faisceau monochromatique se propagent à la même vitesse. Alors comment certains peuvent-ils accumuler du retard ? Eh bien, par exemple, en faisant un détour, en ne se déplaçant pas en ligne droite par exemple !

La ligne droite, est le chemin le plus court (en distance) pour aller d’un point A à un point B. Pour la lumière qui se propage toujours à la même vitesse, il s’agit aussi du trajet le plus rapide (en temps).
Tous les autres chemins sont donc plus longs, et par conséquent un rayon qui emprunterait un tel chemin finirait avec un retard, et donc un décalage par rapport aux autres ondes :

Interférences destructives
L’allongement du temps de parcours sur le trajet non rectiligne produit des interférences destructives.

Ici, les deux rayons sont émis par la même source : elles ont la même fréquence et partent avec un déphasage nul : les deux ondes sont superposables et leur somme serait positive au départ. À l’arrivée cependant, à cause de l’allongement du trajet non rectiligne, les deux rayons sont décalés et leur somme n’est plus forcément positif et peut même être nul !

En général, deux ondes forment une interférence parfaitement nulle que s’ils sont en parfaite opposition de phase. Cela arrive donc aussi rarement que deux ondes en parfaite phase avec une somme maximale. Cela dit, tous les cas intermédiaires, bien que non totalement nuls constituent une diminution de l’énergie lumineuse : l’énergie de la somme des ondes étant inférieur à la somme des énergies ondes.

Avec un grand nombre de rayons, donc, les rayons se déplaçant chacun sur un chemin différent finissent par dissiper l’ensemble de leur énergie à cause d’interférence totalement ou partiellement destructives. Inversement, tous les rayons qui suivent la ligne droite, sans détours, ne subissent que des interférences constructives et aucune énergie n’est perdue.

Au final, même si certains rayons empruntent un chemin qui n’est pas la ligne droite, ils finiront dissipés, ne nous laissant alors qu’en présence des seuls rayons dont l’énergie n’est pas dissipée : ceux qui vont en ligne droite.

En conclusion

La lumière dans le cadre ondulatoire n’a vraiment de sens que si on considère la source lumineuse comme émettant un ensemble de rayons au sein d’un faisceau complet plus large.

Parmi tous ces rayons, on peut tout à fait considérer qu’ils empruntent chacun leur propre chemin, mais dans ce cas, on conclut que les rayons qui passent par un chemin qui n’est pas la ligne droite finissent par se dissiper totalement entre eux (à force d’interférer). Seuls subsisteront les rayons qui passent par la ligne droite.

Au final, on n’observera toujours que des rayons rectilignes, et c’est pour cela qu’on peut dire que la lumière se propage bien en ligne droite.

image d’en-tête de Astroshots42

7 commentaires

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Ténor écrit :

Ligne droite "relativiste" quand même !...

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poulpe écrit :

Il y aurait donc vraiment des "rayons" avec des trajectoires non rectilignes et qui seraient dissipés par interférence ? Ou c'est juste une experience de pensée pour dire qu'ils ne peuvent pas exister (ou du moins être mesurables) ?

bisou

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Le Hollandais Volant écrit :

@poulpe : je n'ai pas de réponse.

Cela dépend de la théorie utilisée. Certaines idées disent que la lumière emprunte tous les chemins possibles, soit une infinité, avant d'emprunter le plus court. Ça revient à ce que je dis dans l'article.

Inversement, dans le cadre Newtonien, si la lumière a une quantité de mouvement, son inertie lui interdit de changer de direction et donc elle va forcément tout droit.

En fait, la science c'est d'observer la nature et de les décrire mathématiquement (avec des équations et des modèles théoriques).

Tant que le modèles théorique est conforme à la réalité, cohérent et fonctionne, on la garde. Si on trouve quelque chose qui ne va pas, on la change.

Pour le moment, l'idee des rayons dans tous les sens n'est pas absurde : on a des expériences où la lumière passe par deux endroits *en même temps* et où un photon unique interfère avec lui-même.

L'idée des interférences constructives/destructives vient s'ajouter à ça pour également expliquer le fait observé que les rayons lumineux se propagent en ligne droite.

Et pour le moment, la physique quantique, la relativité et l'electrodynamique quantique (qui s'expliquent par ce que je décris dans mon article) sont des théories qui se tiennent.

Ajoutons à cela qu'il existe des rayons qui se courbent :lors d'un mirage ou dans une fibre optique. Mais on sort du cadre d'un milieu homogène. Pareil quand on observe le phénomène de lentille gravitationnelle, c'est ce dont parle
@Ténor.

Mais tout ça c'est pour les autres articles qui vont venir.

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meteore223 écrit :

J'avance une autre hypothèse :
Un photon est une impulsion d'énergie émise perpendiculairement au plan de rotation de l'électron, vers l'avant et vers l'arrière, d'oû la transmission en ligne droite de la lumière.
Le photon émis a un plan de polarisation perpendiculaire à son axe de déplacement. Sur ce plan, il possède une polarisation circulaire due à la rotation de l'électron pendant le temps d'émission temps de passage d'une couche à la couche inférieure, et temps égal à la durée de vie de l'état excité, de l'ordre de la dizaine ou quelques dizaines de nanosecondes.
Qu'en pensez vous ?

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man-x86 écrit :

Ça me rappelle un excercice d'optique où un rayon était réfracté et réfléchi successivement par plusieurs particules (censées modéliser du brouillard de densité variant avec l'altitude). Le résultat ressemblait à un faisceau conique courbé en fonction de la densité du brouillard.


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