Bien que ce ne soit pas nécessaire pour comprendre cet article, je vous en conseille la lecture si le sujet vous intéresse :
- Pourquoi la lumière va moins vite dans l’eau ou le verre ?
- Pourquoi la lumière se propage en ligne droite ? (le présent article)
- Pourquoi la vitesse de la lumière est-elle ce qu’elle est ?
- Comment fonctionne un miroir ?
- Pourquoi la direction de la lumière change-t-elle quand elle pénètre dans l’eau ?
J’ai déjà expliqué pourquoi la lumière ralentit passant dans l’eau ou dans un autre milieu. J’aurais pu commencer par un autre point qui revient souvent, à savoir : pourquoi la lumière se propage en ligne droite ?
C’est vrai : que l’on parle de la loi de Descartes, de la déviation de la lumière dans l’eau, ou de la finitude de la vitesse de la lumière (les articles sont à venir), on part d’un postulat très simple mais fondamental : un rayon de lumière se propage en ligne droite.
Dans le cadre corpusculaire, où la lumière est une particule nommée photon, il est simple de comprendre pourquoi la lumière se propage en ligne droite : la particule est simplement en mouvement, et elle conserve son mouvement par inertie, n’ayant aucune raison de changer de direction puisqu’aucune force ne vient la dévier.
Dans le cadre ondulatoire, par contre, la raison est un peu plus complexe, et c’est ça que je chercherai à expliquer ici.
Le faisceau lumineux
Un rayon de lumière ne se propage jamais seul. On ne peut pas vraiment définir ce qu’est un rayon de lumière : si l’on fait ça, autant considérer un photon directement. En général, on considère un faisceau de lumière, c’est-à-dire un ensemble de rayons qui se suivent, issues de la même source et avec une direction identique.
C’est dans un faisceau lumière que les différents rayons, les différentes ondes, interfèrent et se comportent de façon très intéressante.
Interférences entre les rayons
J’en ai déjà parlé dans l’article sur le ralentissement de la lumière dans l’eau ou verre, mais quand plusieurs ondes lumineuses se retrouvent au même endroit, ils interfèrent.
Une onde lumineuse constitue une perturbation du champ électromagnétique et qui se déplace. Quand deux perturbations se croisent, elles s’additionnent. Or, cette perturbation oscille entre valeurs positives et négatives, par conséquent, quand elles s’additionnent, elles peuvent aussi s’annuler :
Dans le dernier cas, les deux ondes (rouge et verte) ne sont pas nulles mais leur somme l’est. La perturbation électromagnétique de l’une annule complètement la perturbation de l’autre. C’est donc comme si deux sources de lumière éclairaient indépendamment mais produisaient une absence de lumière si elles étaient utilisées simultanément.
Ceci est vrai pour toutes les ondes, y compris sonores. C’est comme ceci que les casques anti-bruit actifs fonctionnent : un micro capte le bruit ambiant, détecte les fréquences, et un petit haut-parleur envoi ensuite un son identique mais déphasé dans l’oreille. Les deux sons s’annulent et l’on n’entend plus le bruit.
Interférences de rayons d’un même faisceau
Dans un faisceau de rayons identiques parallèles et rectilignes issus de la même source monochromatique (par exemple un laser), tous les rayons sont identiques et superposables. La somme de ces rayons produit donc une interférence additive : plein de « petits » rayons forment un faisceau très lumineux :
Bien-sûr, ceci se produit car tous les rayons se propagent à la même vitesse et ont la même forme. Si un des rayons se propage moins vite, les pics et les creux sur l’onde accumulent du retard et peuvent se retrouver décalées par rapport à une autre onde, au moins à certains endroits.
On se retrouve alors dans le cas d’une interférence destructive : la somme des ondes devient nulle.
Évidemment, dans un milieu homogène (l’air, le verre, l’eau, le vide…) tous les rayons d’un faisceau monochromatique se propagent à la même vitesse. Alors comment certains peuvent-ils accumuler du retard ? Eh bien, par exemple, en faisant un détour, en ne se déplaçant pas en ligne droite par exemple !
La ligne droite, est le chemin le plus court (en distance) pour aller d’un point A à un point B. Pour la lumière qui se propage toujours à la même vitesse, il s’agit aussi du trajet le plus rapide (en temps).
Tous les autres chemins sont donc plus longs, et par conséquent un rayon qui emprunterait un tel chemin finirait avec un retard, et donc un décalage par rapport aux autres ondes :
Ici, les deux rayons sont émis par la même source : elles ont la même fréquence et partent avec un déphasage nul : les deux ondes sont superposables et leur somme serait positive au départ. À l’arrivée cependant, à cause de l’allongement du trajet non rectiligne, les deux rayons sont décalés et leur somme n’est plus forcément positif et peut même être nul !
En général, deux ondes forment une interférence parfaitement nulle que s’ils sont en parfaite opposition de phase. Cela arrive donc aussi rarement que deux ondes en parfaite phase avec une somme maximale. Cela dit, tous les cas intermédiaires, bien que non totalement nuls constituent une diminution de l’énergie lumineuse : l’énergie de la somme des ondes étant inférieur à la somme des énergies ondes.
Avec un grand nombre de rayons, donc, les rayons se déplaçant chacun sur un chemin différent finissent par dissiper l’ensemble de leur énergie à cause d’interférence totalement ou partiellement destructives. Inversement, tous les rayons qui suivent la ligne droite, sans détours, ne subissent que des interférences constructives et aucune énergie n’est perdue.
Au final, même si certains rayons empruntent un chemin qui n’est pas la ligne droite, ils finiront dissipés, ne nous laissant alors qu’en présence des seuls rayons dont l’énergie n’est pas dissipée : ceux qui vont en ligne droite.
En conclusion
La lumière dans le cadre ondulatoire n’a vraiment de sens que si on considère la source lumineuse comme émettant un ensemble de rayons au sein d’un faisceau complet plus large.
Parmi tous ces rayons, on peut tout à fait considérer qu’ils empruntent chacun leur propre chemin, mais dans ce cas, on conclut que les rayons qui passent par un chemin qui n’est pas la ligne droite finissent par se dissiper totalement entre eux (à force d’interférer). Seuls subsisteront les rayons qui passent par la ligne droite.
Au final, on n’observera toujours que des rayons rectilignes, et c’est pour cela qu’on peut dire que la lumière se propage bien en ligne droite.