Dans ce troisième article sur les choses que l’on peut faire à la maison, je vous propose de vous munir d’un aimant puissant (ceux qu’on trouve dans les disques durs par exemple, ou un capable de lever une boule de pétanque).
Repousser de l’eau
Un aimant attire le fer, l’acier et un autre aimant. Concernant le dernier, il peut également le repousser si on change son orientation.
Mais savez-vous qu’il existe également des matériaux naturellement et constamment repoussés par les aimants ? Ce sont les matériaux diamagnétiques.
En présence d’un champ magnétique, les matériaux diamagnétiques développent leur propre champ magnétique, opposé au premier.
Un tel matériau n’est pas magnétique en soi : il n’attire pas le fer et ne repousse pas d’autres matériaux. Mais il repousse un aimant quand ce dernier est suffisamment proche.
L’eau est un matériau diamagnétique, et on peut le voir avec un aimant suffisamment petit et puissant : quand on suspend un aimant au-dessus de l’eau, un petit creux apparaît à la surface du liquide :
Ces expériences où l’on vous montre que les céréales sont attirées par un aimant ne montrent en réalité que le diamagnétisme de l’eau qui compose le lait : l’aimant repousse l’eau, et cela crée un creux à la surface. La céréale tombe alors dans le creux, donnant l’apparence qu’il est attiré par l’aimant.
Cela ne vient pas du fer qui se trouve dans la céréale : l’expérience fonctionne avec du polystyrène ou du pollen, qui ne contiennent pas de fer du tout. D’autres matériaux sont diamagnétiques également, comme le carbone pyrolithique ou le bismuth. Il existe ainsi des figurines où un petit aimant flotte indéfiniment entre deux plaques de bismuth.
Tomber au ralenti
Lorsque l’on fait tomber un objet, il tombe en accélérant à un taux égal à 1 g, où g est l’accélération de la pesanteur), soit 9,81 m/s². Cela veut dire que chaque seconde, la vitesse de chute augmente de 9,81 m/s, ignorant les effets dus aux frottements de l’air.
Maintenant, quand on fait tomber un aimant à travers un tube métallique non-ferreux, même si l’aimant ne frotte pas contre les parois du tube, il est ralenti : l’aimant tombe lentement à travers le tube, défiant alors la gravité.
Il existe deux petits fidgets qui utilisent ce principe pour fonctionner : le Moondrop et le Feel-flux :
Comment ça se fait ?
L’aimant possède un champ magnétique autour de lui. Si l’aimant est immobile, le champ magnétique est statique, invariant. Si l’on bouge l’aimant, alors le champ se déplace avec lui. Autrement dit, si l’on reste posé à un endroit donné, le champ se déplace et varie. Or, un champ magnétique qui varie, ça produit un courant électrique s’il y a un métal pas loin.
C’est ce qui se passe dans le tube : si l’aimant tombe à travers le tube il va induire un courant électrique circulaire dans le tube : on parle de courants de Foucault. Maintenant, que fait un courant électrique ? Il produit un champ magnétique !
Or, le champ magnétique produit par le courant induit par la chute de l’aimant est opposé au champ magnétique de l’aimant lui-même (loi de Lenz). Il en résulte que l’aimant qui chute va voir une force magnétique s’opposer à sa chute : cette force freine la chute de l’aimant et ce dernier tombe au ralenti.
L’aimant ne peut cependant pas s’arrêter totalement : si cela devait arriver, le champ magnétique ne varierait plus, il n’y aurait plus de courant et donc plus non plus de champ magnétique secondaire pour empêcher l’aimant de tomber. En somme, l’aimant est ralenti seulement quand il tombe. S’il s’arrête, on ne peut plus dire qu’il tombe et il n’est plus ralenti.
L’aimant doit tomber pour être ralenti. Et plus l’aimant est puissant, ou plus le tube est conducteur, plus le ralentissement est prononcé : la force empêchant l’aimant de tomber tend alors à s’approche de la force poids qui tire l’aimant vers le bas.
Avec le fidget du Feel-Flux, vous avez la version en cuivre et celle en aluminium. La version en aluminium est bien moins chère, mais celle en cuivre offre un meilleur résultat : le cuivre est meilleur conducteur que l’aluminium.
Enfin, il est à noter que si la chute est ralentie, il y a une déperdition d’énergie cinétique. Cette déperdition a lieu sous forme de pertes thermiques dans le métal. Certains trains ou camions utilisent des freins magnétiques basés sur ce principe pour ralentir sans utiliser de frottements mécaniques (et donc réduit les points d’usure).
Déformer l’image d’un écran CRT
Les écrans CRT, pour cathode ray tube, ou « tubes à rayons cathodiques » sont les écrans cathodiques, ceux des vieilles télés ou écrans.
Ces écrans fonctionnent à base de hautes tensions : une électrode — la cathode — est mise à un très fort potentiel électrique qui va accumuler beaucoup d’électrons dessus. Cette accumulation d’électrons va rendre la cathode très fortement négative et les électrons vont finir par s’en échapper à très grande vitesse, créant un rayon d’électrons.
Vu que le tube cathodique lui-même est sous vide, les électrons fusent à travers le tube à une fraction notable de la vitesse de la lumière. Ils viennent ensuite heurter la surface de l’écran. Ce dernier est recouvert de luminophores et la zone bombardée d’électrons devient lumineuse.
En contrôlant l’orientation du faisceau d’électrons, on arrive à viser les bons pixels et à reconstituer l’image sur la télé.
Les vieux écrans, avant les écrans plats, fonctionnaient comme ça. En soi, c’étaient des accélérateurs de particules de salon.
Maintenant l’aimant : les électrons sont des charges électriques. Or une charge électrique qui se déplace produit un champ magnétique. Si on approche un aimant, le champ magnétique du faisceau va être dévié.
Résultat, si l’on approche un aimant d’un écran cathodique : les électrons tapent dans les mauvais pixels et l’image est déformée. S’il vous reste un tel écran, essayez avec un aimant : cela forme des figures colorées et géométriques, qui tendent à mettre en évidence le champ magnétique de l’aimant (sa forme, son sens…) :
Ces écrans avaient d’ailleurs parfois un bouton « démagnétiser », pour recalibrer l’image et la débarrasser de tout magnétisme résiduel, et ainsi remettre le faisceau en face des pixels.
Ressentir l’oscillation des courants alternatifs
Les aimants sont sensibles aux champs magnétiques : ils réagissent aux champs externes. Ces champs externes peuvent venir d’un autre aimant ou d’un électroaimant. Les transformateurs électriques permettent de convertir de passer d’un courant haute tension (et basse intensité) à un courant basse tension (et haute intensité) en faisant transiter l’énergie électrique par une phase où l’énergie est sous forme magnétique.
Une petite partie de cette énergie magnétique peut fuiter en dehors du bloc transformateur et on peut la détecter. Si l’on tient un aimant dans la main et que l’on approche un dispositif transformateur d’électricité, alors l’aimant se met à vibrer au rythme du champ magnétique dans le transformateur ; lui-même oscillant au rythme des oscillations du courant, généralement 50 Hz.
On peut en faire l’expérience à la maison : les transformateurs électriques ne manquent pas dans nos maisons. Des blocs transformateurs d’un PC, au chargeur d’un téléphone, ou alors, là où ça marche le mieux, ce sont les lampes de bureau basse tension avec un socle. On peut alors poser l’aimant dessus et l’entendre ou le sentir vibrer à 50 Hz !
Parfois, avec les très gros transformateurs, la carcasse métallique même du transformateur vibre sous l’effet du champ magnétique. On appelle ça la magnétostriction et c’est ce qui produit le bruit caractéristique des transformateurs ou même des moteurs électriques (train, voiture électrique, métro…).
Les détecteurs antivol dans les supermarchés fonctionnent également avec des champs magnétiques alternatifs. Ces derniers sont émis par les portiques antivol aux casses ou à la sortie du magasin. Si on essaye de faire passer un article muni d’un dispositif antivol, ce dernier réagit et émet son propre champ magnétique. Ce dernier est ensuite capté par le portique et il sonne.
Vous pouvez passer par un tel portique en tenant un aimant dans la main (rassurez-vous, un aimant permanent ne fait pas sonner les portiques) : il vibrera et vous le sentirez.
Détecter les faux billets
Parmi les nombreuses mesures de protections contre la contrefaçon utilisée sur les billets de banque, il y a l’encre ferromagnétique.
Il s’agit d’une encre dont un des ingrédients contient de l’oxyde de fer, qui réagit à un aimant : le billet est attiré par l’aimant. Les billets en euro (la première série) contient également cette mesure de sécurité et si vous avez un aimant puissant, vous pouvez réussir à attirer certaines parties du billet vers l’aimant :
Notez bien que tout le billet n’est pas magnétique, seules certaines portions le sont. Mais en baladant l’aimant dessus, vous trouverez assez vite les portions concernées.
Certains détecteurs de faux billets fonctionnent en testant la présence et la position de la bande magnétique sur le billet. D’autres détecteurs pratiquent le test à la lumière UV (certaines encres sont fluorescentes), d’autres aux infrarouges, ou encore à la présence de symboles ou inscriptions particulières (constellation EURion).