Un rayon vert.

Cet article fait partie d’une série d’articles sur les phénomènes du folklore marin.
Bien que ce ne soit pas nécessaire pour comprendre cet article, je vous en conseille la lecture si le sujet vous intéresse :

La science, c’est la discipline qui permet d’expliquer les phénomènes observés.

Ainsi, quand une pomme tombe, la science explique ça par la gravité : une force attractive présente au niveau de tous les objets massifs. C’est à Newton que l’on doit cette définition-là. La théorie de gravitation de Newton a permis d’expliquer beaucoup de choses à l’époque où nos connaissances n’étaient pas aussi importantes que maintenant.

Justement, quand nous ne savions pas encore certaines choses et que la nature nous mettait face à un nouveau phénomène, on attribuait cela à la superstition, à la mythologie ou à la religion.
Par exemple, quand un nouvel astre venait illuminer notre ciel nocturne sans raisons apparente, on disait qu’une des divinités était en colère. Le terme « désastre » vient d’ailleurs de là : un « mauvais astre », « mauvaise étoile », présageant quelque chose d’horrible.

L’histoire est pleine de phénomènes inexpliqués attribués à la colère divine. Heureusement, notre connaissance des lois de la nature n’a cessé de progresser et désormais on comprend mieux ce qui se passe.

Dans cette série d’articles, je vais présenter quelques-uns de ces phénomènes aujourd’hui expliqués mais qui autrefois étaient synonymes de mauvais présages et plus précisément des phénomènes maritimes, rapportés par les marins d’autrefois durant leurs voyages, et faisant aujourd’hui partie du folklore marin.

Dans cet article : le rayon vert.

Une lumière verte impossible en temps normal ?

Le rayon vert, aussi appelé flash vert, apparaît au couchant : la dernière lueur du soleil avant l’obscurité est alors une lumière verte. Ce phénomène très rare était perçu comme le retour d’une âme défunte parmi les vivants. Pour d’autres, voir un rayon vert pouvait donner le pouvoir surnaturel, comme celui de lire les pensées des gens que l’on croiserait, ou encore dans leurs cœurs. C’est par exemple ce qu’a fait Jules Verne dans Le Rayon Vert, où l’héroïne refuse de se marier avant d’avoir aperçu le rayon vert afin d’être sûre des sentiments de son amant. Verne cependant attribue le phénomène à une illusion d’optique (ce qu’il n’est pas).

Observer une lumière verte semble à première vue assez extraordinaire : en effet, les étoiles vertes n’existent pas. Il existe des étoiles rouges, jaunes, blanches, bleues… mais pas vertes. La raison à cela est que les étoiles émettent un très large spectre lumineux.

Les étoiles les moins chaudes émettent les grandes longueurs d’onde, à peu près jusqu’à l’orange, avec une grande partie dans le rouge : elles apparaissent rouges.

Pour les étoiles les plus chaudes, elles émettent une part majoritaire de leur lumière dans le bleu et même l’UV. Leur couleur dominante est le bleu.

S’il n’y a pas d’étoiles vertes, c’est parce que le vert est au centre du spectre visible. Si le pic d’émission de l’étoile se trouve dans le vert, il émet également pas mal de rouge et de bleu, et la somme des couleurs apparaît blanche, pas verte.

Animation sur la couleur perçue en fonction du spectre d’émission d’une étoile. (animation)

Le Soleil émet d’ailleurs son maximum d’émission dans le vert, mais il apparaît sensiblement blanc dans l’espace, et jaune après le filtrage du bleu par l’atmosphère.

Mécanisme de la production d’un rayon vert

Et bien justement, parlons du filtrage atmosphérique de la lumière.

L’air est un milieu dispersif. Ceci signifie que toutes les longueurs d’onde ne sont pas réfractées de la même manière : les courtes longueurs d’onde sont davantage déviées que les grandes longueurs d’onde.
Ainsi, le violet est plus dévié que le bleu, lui-même plus que le vert, lui-même plus que le jaune et lui-même plus que le rouge. C’est pour ça que les rayons blancs du soleil se décomposent dans cet ordre avec un arc-en-ciel.

Quand le Soleil commence à passer sous l’horizon, les rayons rouges et jaunes vont pratiquement en ligne droite et nous passent au-dessus, le vert est légèrement dévié et le bleu et le violet sont fortement déviés. Ceci signifie que même si le disque solaire est sous l’horizon, il y a quelques instants où le vert, le bleu et le violet nous parviennent encore.

Il devrait donc y avoir une lueur bleu-vert-violet.

Sauf qu’il faut ajouter au phénomène de dispersion, celui de la diffusion, dite de Rayleigh. La diffusion fait que les rayons sont diffusés partout par les molécules de l’air. Cette diffusion est beaucoup plus prononcée par les courtes longueurs d’onde que par les longues.

Ainsi, le violet et le bleu de la lumière solaire sont très largement diffusés : c’est pour ça que le ciel apparaît bleu : le bleu est envoyé partout et nous parvient donc de partout également, de tout le ciel.

Dans le cas d’un soleil couchant maintenant, quand le soleil vient tout juste de passer sous l’horizon, le rouge et l’orange ne sont pas visibles (les rayons ne sont pas déviés suffisamment pour nous parvenir) et le bleu et le violet sont dispersés. Il subsiste une couleur intermédiaire : le vert, qui se trouve entre la limite de ce qui est diffracté vers le sol et ce qui est diffusé par l’air.

Le dernier rayon qui n’est pas massivement diffusé et toujours visible en provenance du disque solaire est donc le vert, d’où le rayon vert :

Principe d’un rayon vert.
Le bleu est diffusé par l’atmosphère, le rouge et le jaune sont déjà « couchés ». Il subsiste, durant un court instant, le rayon vert.

Les phénomènes de dispersion et de diffusion interviennent en permanence, mais le rayon vert est un phénomène très rare. En effet, généralement les couches de l’atmosphère sont agitées à cause des vents, ou alors le ciel est plein d’humidité ou de poussière, et le rayon vert n’est pas visible.

Seul un air particulièrement pur par une météo très calme et très claire, y compris en altitude, peut produire un rayon vert, ce qui explique sa rareté

Par ailleurs, il faut que l’horizon soit situé le plus loin possible, pour amplifier les deux phénomènes expliqués plus haut. C’est pour cela que le rayon vert se produit généralement en mer, et non sur la terre ferme, où le relief n’aide pas.

Pour conclure

Le monde maritime, où les marins partaient en mer pendant de longs mois sans aucun contact avec le continent et revenant alors avec des histoires en tout genre souvent exagérés, est plein de mythes et légendes.

Le rayon vert, comme tant d’autres, est un phénomène bien réel, mais n’est expliqué que depuis récemment. Et pour cause : la science de l’optique ondulatoire et des phénomènes atmosphériques sont elles aussi récentes.

Pour les marins d’autrefois, donc, la seule façon d’expliquer un tel phénomène rare et étrange était le surnaturel, comme les colères ou les bénédictions divines. Cela semblait alors normal.

image d’en-tête de Mbz1

1 commentaire

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Ténor écrit :

Une sorte de rayon "bio" donc ?
Sinon, le soir, dans des conditions de couchant, notre ombre projetée n'est pas noire mais colorée dans des tons sombres pastels. J'ai rêvé, ou il y a une explication ?


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