Une vitre recouverte de givre.
Vous avez sûrement déjà eu à gratter votre pare-brise de voiture le matin en hiver, pour enlever le givre. Le givre est simplement de la glace apparue par condensation de l’humidité de l’air sur une surface particulièrement froide, comme votre vitre.

Peut-être avez-vous remarqué que, parfois, du givre soit apparu quand bien même les températures n’ont pas été négatives au cours de la nuit.

Comment est-ce possible ? Comment la glace peut-elle se former si l’air est à +4 °C ?
Ce phénomène curieux, bien réel, se produit par la combinaison de plusieurs facteurs.

De la mesure de la température par les services météo

La température donnée par la météo est la température de l’air. Celle de Météo France l’est dans des abris météo standardisées, appelés abri Stevenson, et qui contiennent toute l’instrumentation météorologique. Ces abris sont peints en blancs, protègent de la pluie et des rayons directs, sont situés entre 1,5 et 2,0 mètres de hauteur par rapport au sol, mais laissent quand-même passer l’air. C’est de cet air qui passe que la température, l’hygrométrie et la pression sont captées.

Cette mesure ne correspond pas toujours à la température ressentie ou obtenue par un thermomètre grand public. Une voiture stationnée au soleil sera plus chaude. Un thermomètre accroché sur un mur ou un arbre à l’ombre sera plus froid.

Si votre météo vous dit +4 °C, la température à certains endroits de votre allée ou de votre jardin peut être parfois différente, y compris la température réelle (pas seulement la température ressentie).

Ceci étant dit, cela ne suffit pas toujours à expliquer le givre. Parfois, l’air est réellement à +4 °C partout et pourtant vous devez gratter la voiture.
Rassurez-vous : la thermodynamique va bien. C’est juste qu’une partie des phénomènes en jeu sont bien cachés.

De l’hygrométrie au cours d’une journée

En journée, l’air est plus chaud que la nuit. Il peut donc capter plus d’eau, ce qu’il fait. Durant la nuit, la température baisse et la même quantité d’eau arrive saturer l’hygrométrie. À ce point, on a atteint le « point de rosée » et l’eau doit sortir de l’air. Il va alors condenser en gouttelettes et tomber sur les différentes surfaces disponibles : l’herbe, le sol, votre voiture… L’eau vient donc de là.

S’il ne fait pas trop froid, l’eau restera là comme telle, c’est-à-dire liquide. Mais s’il fait sous les +4 °C, qu’il n’y a pas trop de vent, et surtout que le ciel est dégagé, les choses se gâtent.

Une question de rayonnement perdu

Généralement, tous les objets au repos et à un même endroit sont à la même température : c’est l’air qui participe à transporter la chaleur entre les objets et à égaliser les températures : on parle de conduction thermique par convection de l’air.

S’il n’y a pas de vent, la convection est réduite et les températures ne s’équilibrent plus très bien. Il faut alors prendre en compte un autre phénomène : le rayonnement thermique.

Tous les corps rayonnent de la chaleur, essentiellement par infrarouge. Le rayonnement est fonction de la température : plus un corps a une température élevée, plus le rayonnement est important. Si des braises nous apparaissent chaudes même à distance, c’est à cause du rayonnement qu’elles émettent. D’ailleurs, quand on dit que les braises sont rouges voire jaunes, c’est que la température est suffisante pour émettre non seulement des infrarouges, mais aussi de la lumière rouge, de plus en plus lumineuse, jusqu’à devenir jaune, blanche…

Ce rayonnement, s’il est capté par un autre corps, peut le réchauffer : ce qui est perdu par l’un est alors gagné par l’autre. Deux objets en vis-à-vis vont finir par équilibrer leur température par un échange de lumière infrarouge.

À présent, si vous placez un objet en direction du ciel la nuit, il rayonnera de l’infrarouge vers l’espace, mais ne recevra rien en retour : il y a bien l’air, mais ce dernier rayonne peu par rapport à un objet solide ; le vide sidéral, lui, ne rayonne rien.

En d’autres termes, votre surface exposée à l’espace va refroidir.

S’il n’y a pas beaucoup de vent, le refroidissement par rayonnement va être plus important que le réchauffement par conduction par l’air.

Lorsqu’il fait entre 0 et +4 °C, cette baisse de température engendrée par le rayonnement perdu dans l’espace est suffisant pour que la surface exposée au ciel passe sous les 0 °C. Si de la buée tombe dessus, elle formera du givre et vous devrez gratter… même si l’air un peu plus loin est à une température positive !

Vous constaterez d’ailleurs que le pare-brise gèle beaucoup plus facilement que les vitres latérales, qui ne sont pas autant exposées au ciel. De surcroît, les vitres latérales sont exposées aux murs, aux buissons, haies, qui rayonnent aussi et réchauffent les vitres, empêchant le givre voire toute condensation de se former !

Vous pouvez donc prévenir la formation de givre en stationnant votre voiture face à un bâtiment ou à un arbre par exemple : ces derniers vont rayonner des infrarouges vers votre vitre et cela suffira pour maintenir la vitre au-dessus de 0 °C. Cela marche très bien, parfois même quand l’air est quelques degrés en dessous de zéro !

Le rayonnement et la perte thermique vers l’espace fonctionne évidemment en l’absence de nuages. S’il y a des nuages, ces derniers captent le rayonnement et renvoient le leur vers le sol, réchauffant le pare-brise et empêchant le givre. Pour cette raison, vous constaterez que les matins où vous devez gratter, sont les matins de nuits claires et sans nuages.

image d’en-tête de Lorie Shaull

5 commentaires

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seb écrit :

J'imagine que c'est la raison pour laquelle les voitures récentes émettent une alerte verglas dès +3°, une route étant encore plus exposée vers la ciel que le pare brise, elle va refroidir encore plus rapidement qu'un pare brise.

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Le Hollandais Volant écrit :

@nicowe : Ah, je ne connaissais pas, et ça semble contre-intuitif, mais c’est assez logique sur le plan thermique.

Un objet se réchauffe ou se refroidit en fonction du bilan thermique qu’il reçoit. S’il reçoit plus d’énergie thermique qu’il n’en émet, il se réchauffe. S’il en reçoit moins, il refroidit.
Dans le cas de ces matériaux, on empêche l’énergie thermique de réchauffer le matériau, tout en autorisant le chaleur du matériau à s’échapper. La lumière du Soleil réfléchie (aucun réchauffement de sa part) mais le rayonnement du matériau est transmise à l’extérieure. Le bilan thermique est négatif : le matériau se refroidit.

Ici c’est clairement un phénomène photonique (purement lumineux). Mais on a la même chose par des processus physico-chimiques : un linge mouillé, par exemple, va sécher au Soleil, c’est à dire que l’eau passer en phase vapeur. Or, cette transition est endothermique : elle requiert de l’énergie thermique. L’eau qui se vaporise va donc capter de l’énergie thermique, à la fois dans le rayonnement solaire et dans le linge. Résultat, le linge donne sa chaleur à l’eau qui s’évapore et va lui-même se refroidir.
Tu peux essayer sur ta main ou ton bras aussi. Mettre de l’eau froide, ça refroidit. Mais mettre de l’eau chaude, aussi ! Si tu mets de l’eau à 40 °C, et que tu laisses sécher quelques instants, tu vas ressentir du froid après quelques instants. C’est pour ça qu’en sortant de la piscine, tu as froid, alors même que l’air est bien plus chaud que l’eau dont tu sors.

Bon après, utiliser de vastes quantités d’eau pour refroidir un bâtiment, alors qu’on a déjà des soucis d’approvisionnement en eau en temps normal, ce n’est pas forcément une solution.

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nicowe écrit :

@Le Hollandais Volant : Oui le bilan thermique se comprend, comme tu dis la thermodynamique va bien!
J'avais songé à mettre des serpillières mouillées sur mes volets orientés au soleil pour servir de boucliers quand il fait trop chaud mais en effet la consommation d'eau que ça engendre est difficile à justifier !

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mjw écrit :

@nicowe : Par contre, pour boire de l'eau fraîche en plein Sahara, entourer une gourde avec des tissus mouillés et suspendre ça en dehors du véhicule, j'ai fait et ça marche bien. C'est d'ailleurs le principe des outres en peau. Elles laissent très très légèrement passer le liquide, qui en s'évaporant refroidit ce qui reste dedans (bon, faut pas espérer boire encore quelque chose après deux semaines, mais en général, c'est pour la journée !


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