Savez-vous que le principe du briquet a été inventé bien avant les allumettes ? Taper deux pierres ensemble pour produire des étincelles projetées sur un matériau combustible est un principe préhistorique, alors que les allumettes telles qu’on les connaît de nos jours, c’est-à-dire un petit bâton enduit d’un produit qui s’enflamme lorsqu’on la gratte date seulement du XIXᵉ siècle !
C’est sur les allumettes que je vais parler dans ce billet, car leur histoire est mouvementée et fait intervenir un peu de chimie, en particulier la chimie étonnante du phosphore !
Les premières allumettes
Les premières allumettes modernes à friction datent de 1826 et sont dues à l’anglais John Walker. Elles contenaient entre autres du sulfure d’antimoine, du chlorate de potassium, une gomme et de l’amidon. L’ensemble prenait feu après un frottement sur une plaquette enduite de phosphore amorphe et de peroxyde de manganèse.
Ces allumettes s’enflammaient même un peu trop violemment dès qu’elles étaient frottées sur une surface rugueuse quelconque, pas uniquement leur boîte, et la flamme étaient instables, en plus d’avoir une odeur désagréable. Elles n’étaient donc pas beaucoup appréciées.
Quelques années plus tard, il fut ajouté du chlorate de plomb à la place du chlorate de potassium et du phosphore blanc, un allotrope du phosphore. Ceci résolvait les problèmes d’instabilité et d’odeur, mais posait un autre problème de taille : la toxicité du phosphore blanc.
Les personnes travaillant alors dans les usines d’allumettes développaient des maladies osseuses allant jusqu’à des déformations graves voire la mort.
Une convention internationale permit, en 1906, d’interdire l’emploi du phosphore blanc dans les allumettes, et il a donc fallu trouver une autre solution.
Les allumettes de sureté actuelles
Les allumettes actuelles sont appelées « allumettes de sûreté », car elles ne peuvent pas s’enflammer par accident. Pour les allumer, il faut désormaisles frotter sur leur boîte et uniquement leur boîte.
Le côté de la boîte, en effet, est enduit d’un composé qui participe à l’inflammation de l’allumette, par un processus physique lié à l’action du frottement. Frotter l’allumette sur la surface abrasive engendre la mise en contact du phosphore rouge et du chlorate de potassium, ce qui enflamme rapidement l’ensemble grâce à l’effet de l’échauffement dû au frottement. Les composés susceptibles de provoquer l’inflammation sont donc séparés : une partie sur l’allumette, l’autre sur le côté de la boîte.
Le mélange de phosphore rouge et de chlorate de potassium est d’ailleurs un explosif utilisé entre autres dans les feux d’artifices et les claques doigts.
En plus de tout ça, la sécurité de ces « allumettes de sûreté » provient aussi de l’absence du phosphore blanc, très toxique dans sa composition.
Conclusion
Les allumettes sont un moyen chimico-mécanique de produire une flamme. Il faut non seulement utiliser une surface contenant du phosphore rouge, et en plus accomplir l’action du frottement afin de mixer de phosphore rouge avec le chlorate de potassium dans l’allumette et de provoquer un échauffement léger mais suffisant.
Sans ces deux choses, l’allumette ne peut pas s’allumer, même accidentellement.
Tout ceci, là où le briquet est davantage un processus physique : on produit une étincelle par frottement qui va allumer un combustible — du gaz — que l’on libère à proximité.
Aujourd’hui, d’autres méthodes de production de feu existent : que ce soit avec une résistance chauffante telle que l’allume-cigare d’une voiture, un arc électrique comme les briquets plasma contenant une mini bobine Tesla, ou encore avec un pointeur laser puissant, dont certains se servent pour effectivement faire du feu.