Il existe des vitres dont on peut contrôler l’opacité : un petit bouton et la vitre devient opaque, comme du verre fumé, ou alors tout noir. C’est le cas de la photo d’en-tête de cet article, qui représente les hublots d’un avion Boeing 787, doté de vitres en smart glass.
La même technologie est également utilisée dans les rétroviseurs de voiture qui se teignent toutes seules pour éviter d’être éblouis la nuit avec les phares de la voiture qui nous suit.
Ces verres sont appelés « smart glass » (vitres intelligentes).
Comment ça marche ?
Du verre électrochromique ?
Sur ce blog, vous avez déjà vu le cas des lunettes photochromiques, qui se teignent toutes seules. Ces lunettes contiennent des particules de bromures d’argent qui deviennent de l’argent solide et donc opaque sous les effets des UV. Quand l’exposition aux UV cesse, l’argent repasse à l’état ionique et le verre redevient progressivement transparent. C’est un processus réversible et passif.
Le verre changeant de couleur à cause de la lumière, ces verres sont dits photochromiques
Dans le cas du smart glass, on veut pouvoir contrôler manuellement quand le verre doit changer d’état. Une exposition passive aux UV ne suffira donc pas pour ce que l’on souhaite faire.
À la place, on utilise une tension électrique, d’où le nom de cette technologie : les verres électrochromiques
La base de ces verres est d’employer un composé chimique bistable, c’est-à-dire qu’il peut prendre deux états — typiquement deux mésomères — qui se distinguent chacun par une couleur.
Dans le cas des verres de rétroviseurs ou des vitres du hublot du Boeing 787 ou des rétroviseurs de voitures, il s’agit d’avoir un état sombre et un état transparent.
Le passage de l’un à l’autre se fait par l’application d’un courant électrique : c’est lui qui va pousser le composé chimique à adopter l’une ou l’autre de ses deux états, en y envoyant des électrons ou des ions.
Fonctionnement
L’un des premiers composés électrochromique découverts est le trioxyde de tungstène, sur lequel on fait migrer des ions lithium ou hydrogène par l’application d’une tension électrique. Inhibé avec les ions lithium, le trioxyde de tungstène bloque le rayonnement infrarouge (agissant comme un filtre de chaleur sur les vitres).
D’autres composés (qu’ils soient inorganiques, tels que les oxydes de molybdène ou de titane ou organiques, telles que la viologène, polypyrrole…) bloquent d’autres portions du spectre lumineux.
Pour que l’on puisse utiliser ces composés sur une vitre, il faut qu’il recouvre toute sa surface, pris en sandwich entre deux électrodes, le tout posé sur du verre. Bien-sûr, l’une des électrodes doit être transparente.
Dans l’ensemble, on obtient une sorte de sandwich assez complexe :
Sur le schéma, l’application d’une tension va pousse les ions de gauche à aller vers la droite. Ces ions vont à leur tour se combiner avec composé électrochromique qui va changer son état : opaque ou transparent.
Une des particularités de ce type de verre est qu’une fois que les ions ont migré, il n’y a plus besoin de maintenir la tension : on peut couper l’alimentation, le verre conservera son état.
Si l’on souhaite la rendre transparente, il suffit d’appliquer une tension inverse, pour libérer les ions et forcer le composé à reprendre son état transparent.
Ceci n’est pas sans rappeler l’affichage à encre électronique. Bien que l’e-ink fonctionne différemment, lui aussi conserve son état (blanc ou noir) sans avoir besoin d’une source d’énergie. Ces dispositifs sont donc très sobres en énergie.
Ces techniques sont tout l’opposé aux affichages LCD ou même OLED, où les couleurs et la luminosité ne persiste que si l’écran est alimenté.
D’autres applications
L’endroit le plus courant où vous pouvez trouver ce type de verre est dans une voiture dotée qu’un miroir central avec mode jour/nuit automatique.
Dans la plupart des voitures, le choix du mode jour/nuit se fait manuellement à l’aide d’une tirette, mais dans certaines voitures, ce mode est géré électroniquement et automatiquement avec un détecteur de luminosité : dès qu’il fait nuit, le miroir devient sombre et le véhicule qui nous suit arrête de nous éblouir.
Une autre application, assez futuriste, se rencontre sur les vitres des cabines de douches dans certains hôtels (ou même chez vous si vous en avez les moyens) : un petit bouton, et la cabine de douche passe de transparent à opaque.
Certaines cabines de toilette peuvent également passer d’un état à un autre, selon qu’elle est occupée ou non (au Japon), ou encore dans certains trains (ICE3 allemand) dans lequel les vitres séparant les compartiments peuvent se « fumer » sur demande.
Il existe aussi des immeubles (Eureka Tower, en Australie) qui les emploient pour filtrer certains domaines du spectre lumineux, en particulier les infrarouges. Le but est d’éviter de surchauffer l’immeuble tout en laissant passer la lumière visible, et donc l’éclairage naturel. Brillant, non ?
Certaines voitures de luxe, comme la Ferrari 575M Maranello « Superamerica » l’utilisent sur son toit vitré panoramique.