Le corps est une machine chimique vaste et complexe où des milliers de molécules différentes agissent et réagissent pour permettre la vie.
Dans le tube à essai géant qu’est notre organisme, certaines de ces molécules sont fondamentales dans le sens où elles gouvernent toute cette machinerie. En particulier la molécule d’acide désoxyribonucléique, ou ADN.
ADN ? ARN ? ARNm ?
L’ADN est une molécule présente dans le noyau de la cellule, et est formée de deux brins complémentaires enroulées ensembles, constitués de centaines de millions de bases nucléiques (des molécules plus petites), et contenant toute l’information qui permet à l’organisme de fonctionner, de sa formation à l’état d’embryon à son développement et son fonctionnement de tous les jours.
L’ADN est composé de millions de bases nucléiques. Mais si l’on ne considère que certaines régions de l’ADN, constituée d’une dizaine à quelques milliers de bases nucléiques seulement, on obtient un gène. Un gène code (chimiquement) pour une seule protéine. L’ensemble des gènes forment l’ADN.
Chaque cellule possède sa propre copie de l’ADN, mais elles ne travaillent pas directement avec elle pour produire les protéines dont elle a besoin pour fonctionner. Pour cela, elle passe par une molécule intermédiaire : l’acide ribonucléique, ou ARN.
L’ARN est donc une copie d’une petite portion de l’ADN est servant de « copie de travail » pour la cellule, quand elle veut synthétiser une protéine en particulier.
Lorsque la cellule a besoin d’envoyer une molécule d’ARN du noyau vers le reste de la cellule, elle fait comme envoyer un message génétique d’une partie à l’autre : ce brin d’ARN s’appelle alors « ARN messager », ou ARNm. Le noyau délègue donc la synthèse de certaines protéines à une autre partie de la cellule au moyen de l’ARNm.
Une fois que l’ARN (ou l’ARNm) est produit, des réactions chimiques peuvent avoir lieu : l’ARN va permettre la synthèse des protéines utiles à la cellule ou à l’organisme, car c’est ça le but, finalement.
Pour résumer
Pour résumer, l’ADN contient l’intégralité du programme génétique d’une cellule. Elle est présente dans chaque cellule.
L’ARN, c’est une copie de travail d’une portion de l’ADN
L’ARNm, c’est quand ce morceau d’ARN est envoyé à travers la cellule.
Pour mieux comprendre, on peut voir l’ADN comme un dictionnaire expliquant comment coder toutes les fonctions et toutes les protéines nécessaires à un être vivant. Si l’ADN est notre dictionnaire, chaque gène correspond à un article. Quant à l’ARN, voyez-le comme une copie d’une page ou d’un article du dictionnaire, et l’ARNm, c’est quand on envoie la page copiée à quelqu’un d’autre pour qu’il l’utilise, à notre place.
Bref rappel du fonctionnement du système immunitaire face à un virus
Un virus, je le rappelle, est un morceau de matériel génétique (ADN ou ARN) protégé par une protéine qui lui sert de membrane. Le virus est incapable de se reproduire seul et a besoin de la cellule d’un hôte pour ça.
La première fois que le corps est confronté à un virus, il doit fabriquer des anti-corps spécifiques aux protéines de ce virus. Le virus est intouchable tant que le corps n’a pas trouvé l’anti-corps qui va bien, un peu comme quand on cherche un produit adapté à tel ou tel nuisible (on ne se débarrasse pas des rats, des escargots ou des doryphores avec les mêmes produits, par exemple).
Toute cette opération prend du temps pour l’organisme et le virus peut alors faire beaucoup de dégâts durant ce temps de recherche.
Une fois que l’organisme a créé le bon anti-corps pour le virus en présence, ces derniers peuvent se fixer à la surface du virus et agir comme des balises. Les lymphocytes (les globules blancs) vont cibler les balises et détruire ainsi le virus.
Si le patient guérit, alors il a vaincu le virus. Le système immunitaire conserve les anti-corps de façon à être prêt la prochaine fois qu’il y sera confronté. C’est pour cela que beaucoup de maladies d’origine virale ne s’attrapent qu’une fois : la première fois. Les fois d’après, le corps détruit le virus avant de tomber malade et on ne s’en rend même pas compte, tout ça grâce à cet effet de mémoire du système immunitaire.
Principe de fonctionnement d’un vaccin
Tous les vaccins ne fonctionnent pas sur le même principe, mais généralement, il s’agit d’inoculer au patient une version affaiblie ou inactive d’un virus pour que le corps s’entraîne dessus. Le corps va se mettre en alerte (avec parfois de la fièvre et de la fatigue), mais c’est normal et sans risque : le contenu de l’injection est inoffensif.
Il s’agit de leurrer l’organisme afin que ce dernier constitue des anti-corps contre le virus. Comme ça, quand ce dernier se présente en vrai, le virus est éliminé immédiatement avant que l’on tombe malade.
Certains vaccins injectent directement des virus inactivés.
Dans le cas du Covid-19, la plupart des vaccins fonctionnent avec de l’ARNm, dont le fonctionnement est légèrement différent.
Cas du vaccin à ARNm
Lors de l’infection par un virus, le brin de matériel génétique (ARN, dans le cas du SARS-CoV-2) pénètre dans une cellule de l’hôte et c’est cette dernière qui va s’occuper de dupliquer le virus. Le virus se libère ensuite en grand nombre dans l’organisme.
Il faut bien voir que la cellule infectée va utiliser l’ARN du virus comme s’il s’agissait du sien. La cellule ne voit pas la différence. Pire : trop occupée à suivre les instructions du virus, la cellule en oublie son fonctionnement normal et peut en mourir.
Et le vaccin à ARNm du coup ?
Dans ces vaccins, on n’injecte pas le virus entier, mais juste une portion de l’ARN du virus. Cet ARN est inoffensif (il ne provoque pas de maladie), mais il va entrer dans les cellules et les forcer à produire des protéines.
Ce sont alors ces protéines qui vont être la cible des anti-corps et du système immunitaire.
Bien-sûr, la protéine produite doit avoir la même « signature » que le virus lui-même : comme ça, l’anti-corps contre cette protéine pourra servir contre le vrai virus, et c’est ça le but de ce type de vaccins.
Le but est toujours d’entraîner l’organisme et lui faire développer les bons anticorps, mais au lieu d’injecter directement une forme désactivée du virus, on injecte seulement un morceau de son ARN. C’est le corps de l’hôte qui va produire les protéines que le système immunitaire va devoir cibler.
L’ARN, et l’ARNm ne sont pas des molécules très stables : elles se dégradent rapidement (en quelques heures). Dans l’organisme, l’ARN n’est qu’une molécule génétique de travail. Elle est vouée à disparaître rapidement après que son travail est fait. Dans le cas d’un vaccin en revanche, il faut que l’ARN soit conservé suffisamment longtemps entre la production en laboratoire et l’injection au patient. Ceci explique pourquoi ces vaccins doivent être conservés au froid et pourquoi toute la logistique pose tant de problème : on parle de froids important, parfois −70 °C, difficiles à atteindre.
Pourquoi vacciner le plus de monde possible ?
Le but du vaccin est de rendre une personne immune à une maladie. Cela doit autant l’empêcher de tomber malade, de souffrir et de présenter des séquelles que le vrai virus aurait laissées, que de transmettre la maladie à d’autres personnes : le système immunitaire entraîné détruit en effet le virus avant de devenir contagieux.
Si suffisamment de personnes sont vaccinées, le virus s’arrêtera de circuler dès qu’il rencontre une personne vaccinée, protégeant alors tout le monde.
Ceci arrive naturellement si une proportion suffisamment importante de la population est immunisée (naturellement ou par vaccination). Pour le SARS-CoV-2, on estime cette proportion à 60 % de la population.
Il suffirait donc que 2/3 de la population soit vaccinée pour que le virus cesse de circuler de façon importante. Dans ce cas, on a atteint l’immunité de groupe : la population est protégée dans son ensemble.
Vacciner le 1/3 des individus restant reste utile, car il permet de protéger les individus, en plus du groupe en cas de nouveau contact avec la maladie.
L’immunité de groupe ne supprime pas le virus : il l’empêche seulement de circuler facilement. L’immunité individuelle permet de supprimer le virus à l’échelle de l’individu.
De plus, les virus, comme tous les organismes, évoluent rapidement. Éradiquer la maladie le plus rapidement, c’est l’éradiquer avant qu’une évolution résistante n’apparaisse, et donc à subir une nouvelle pandémie et devoir recherche un nouveau vaccin (comme c’est le cas pour la grippe, par exemple).
D’où l’importance actuelle d’aller rapidement dans la vaccination de toute la population.
Conclusion
L’ARNm est un brin d’ARN, lui-même l’équivalent d’une portion de l’ADN. L’ARNm permet à la cellule de travailler sans avoir à toucher à l’ADN lui-même, qui reste à l’abri dans le noyau de la cellule. La cellule peut synthétiser certaines protéines dont elle a besoin grâce à l’ARNm.
Le vaccin utilise de l’ARNm du virus : les cellules du corps vont utiliser cet ARNm comme si c’était le sien, et synthétiser la protéine pour laquelle cet ARNm code.
Cette protéine, bien que produite par la cellule de l’hôte et inoffensive, reste une protéine étrangère au corps humain et sera donc ciblée par le système immunitaire, qui a alors tout le temps nécessaire pour trouver un anticorps, alors que s’il fait face au vrai virus, ce dernier peut commencer à faire dégâts durant ce temps.
D’autres liens sur ce blog, en rapport avec la pandémie de Covid-19 :