two fish
Quand il fait froid, les lacs, les canaux et les rivières peuvent également geler et de recouvrir d’une importante couche de glace.

Ceci nous amène à la question : comment les poissons survivent-ils l’hiver, sans geler ?

C’est la question que personne ne se pose mais qui permet d’introduire une des (nombreuses) particularités de l’eau par rapport à pratiquement tous les autres liquides.

De façon générale, la densité d’un liquide varie avec la température. Généralement, la densité maximale est atteinte au point de fusion. Pour l’eau et une poignée d’autres liquides, ce n’est pas le cas. La densité maximale de l’eau est ainsi atteinte à +3,98 °C. On parle alors de l’anomalie dilatométrique.

Dans un lac où les couches d’eau sont empilées par densité, le fond (le plus dense) est à 3,98 °C. En hiver, l’eau à 0 °C, moins dense, se retrouve à la surface et gèle, formant une couche de glace recouvrant le lac.

Les poissons, eux, survivent en restant au fond de la rivière, là où il fait 3,98 °C.

En été, il se produit l’opposé : le fond le plus dense est toujours à 3,98 °C, mais les couches au-dessus sont alors plus chaudes (également moins denses). De nouveau, les poissons vont préférer rester au fond de la rivière où la température est stable.

Les poissons disposent donc tout au long de l’année, au fond du lac, une région où la température est constante et évidemment toujours liquide :

Schéma en coupe d’une rivière où les poissons tirent partie de l’anomalie dilatométrique de l’eau.
Schéma représentent les couches d’eau dans un lac, en été (à gauche) et en hiver (à droite). Dans les deux cas, l’eau tout au fond est à la même température de 3,98 °C, ce qui permet aux poissons d’avoir une température constante toute l’année. (image)

De plus, et ceci est vrai pour tous les liquides, quand un matériau passe à l’état de solide, il libère une importante quantité d’énergie, appelée chaleur latente. Cette chaleur part dans l’eau et empêche toute la rivière de geler d’un seul coup. C’est aussi ça qui permet au lac gelé de rester globalement entre 0 et 3,98 °C durant plusieurs mois alors que l’air peut descendre jusqu’à −10 ou −20 °C. C’est donc comme si une partie seulement de l’eau gèle pour que le reste de l’eau puisse rester liquide et permettre au poissons de survivre.

La nature est bien faite, non ?

Cette histoire de chaleur latente, l’énergie libérée quand un corps se solidifie, c’est ce qui est mis à profit dans les chaufferettes de poche). Le passage du liquide en phase solide va le réchauffer. Pour le recharger, il suffit de placer la chaufferette dans de l’eau bouillante.

photo d’en-tête d’Anita Hart

(Cet article a initialement été publié sur Le Hollandais Volant. J’ai décidé de le déplacer ici, avec ses commentaires)

31 commentaires

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Sbgodin écrit :

Bien trouvé !

Vu l'évolution continue de la densité, il existe pour toute température entre 0 et 4°C (pour faire simple) une autre température supérieure à 4°C et de même densité d'eau ? Et dans ce cas, si on fait abstraction de la congélation, tout thermomètre à eau serait douteux entre 0 et quelques degrés car il y aurait deux températures possibles pour un même niveau mesuré ?

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Janus24 écrit :


L’eau qui gèle sous la glace transmet donc sa chaleur latente à l’eau en dessOus


Ou alors j'ai rien compris :p

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Allchimik écrit :

Globalement j'ai compris, mais ce que je ne comprends pas c'est ce 3,98°C.

Pourquoi pas 5°C ou 3°C ? Et cette température (se trouvant toujours au fond de la rivière/étang) ne varie pas du tout en fonction de la hauteur d'eau ?

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Quentin écrit :

Et du coup ils se pèlent les nageoires toute l'année.

Plus sérieusement, il y a même des lacs aux pôles qui ne gèlent jamais jusqu'au fond, malgré une température de 0 à 5°C. La température au fond peut y être plus basse mais jamais plus haute que 4°C.

@Sbgodin : Exact, l'eau ne ferait pas un bon thermomètre.

@Allchimik : Cette température est liée à la chimie de l'eau et ne change pas. Le "poids" de l'eau (pour simplifier) est le plus grand à 4°C (pas à 3 ni à 5°) et coule au fond.

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thib écrit :

Il me semble également que comme ce sont des animaux à sang froid, leur métabolisme ralentit quand la température décroit. J'ai déjà vu des poissons pris dans la glace pendant plusieurs jours, repartir comme en 40 une fois le bassin dégelé.

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GoustiFruit écrit :

En plus du froid, mes poissons passent pratiquement 6 mois sans manger et sans oxygénation du bassin (parce que le brassage de l'eau ferait justement descendre l'eau froide).

Travaux dirigés: pour la prochaine fois je veux bien avoir l'explication scientifique de l'évaporation de l'eau à "température ambiante": comment l'eau des océans par ex. s'évapore alors que la température d'ébullition est de 100°C ??? On m'aurait menti ? Ou sur le bord de mon évier, la goutte d'eau qui s'évapore en quelques heures alors que la pièce est à 20°C maxi. Hein, comment qu'elle fait la goutte d'eau, hein ?

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Le Hollandais Volant écrit :

@GoustiFruit : j'ai déjà un article sur ça :p.
100°C c'est l'ebulition
les océans, c'est l'évaporation.

http://lehollandaisvolant.net/index.php?d=2011/02/05/18/54/23-A-toute-vapeur

@Allchimik : pourquoi l'eau gèle à 0°C et pas à 12°C ? parce que c'est comme ça. Idem pour la densité : 3,98°C c'est la température où l'eau est la plus dense.

@Sbgodin : exactement.
Ainsi entre 0 et 10 degrés, la densité de l'eau est croissante (de 0 à 3,98) et décroissante de 3,98 à 10.

après non, soit il fait froid, et l'eau la pkus dense est l'eau chaude à 3,98°C soit il fait chaud et l'eau la plus dense est l'eau froide à 3,98°C.

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qwerty écrit :

En plus, l'eau bouge, donc a de l'énergie pour ne pas geler. Génial, tu fais un article sur quoi je bosse actuellement en physique chimie. Moi, au vu du titre, je t'aurai parlé des grenouilles qui se fabrique un gel pour se conserver dans la vase en attendant les bons jours !

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Inferny écrit :

Je me demandais quelque chose , si sur une étendue d'eau assez profonde mais pas très grande , la pression ne ferait pas déplacer suffisament le point de fusion de l'eau pour faire geler le fond ?

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Le Hollandais Volant écrit :

@Inferny : la pression n'est pas suffisante. la pression augmente de 1bar tous les dix mètres.
Vas donc trouver un lac suffisamment petit pour geler et suffisammebt profond pour augmenter la pression de façon significative.

Pour donner une idee : une bouteille de coca est deja facilement à 5 ou 6 bar et une bouteille de champagne à 10-15 bar.

Du plus j'aurais tendance à dire l'inverse : la pression augmente la densité, donc pousse l'eau à rester à 4°C.
C'est également une caractéristique de l'eau : la phase liquide est plus dense que la phase solide (un glaçon flotte) : donc si la pression edt vraiment collossale sur l'eau, geler augmentera encore d'avantage la pression. Ce n'est pas avantageux énergétiquement parlant. (je pense, hein, je ne suis pas sûr).

Enfin, un lac vraiment très profond, de l'ordre de 200 ou 300 mètres serait plus chaud au fond à cause de la chaleur de la terre (géothermie).

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Sylvhem écrit :

Je me posais la question depuis un moment... Je me doutais bien que les poissons restaient au fond pour ne pas être pris dans la glace, mais je n'avais pas l'explication exacte. Merci Timo ! Au passage, j'aime beaucoup tes articles sur la science.

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seb écrit :

Donc si je veux avoir ma bière au frais toute l'année, il faut que je fasse un circuit fermé avec l'eau au fond d'une pièce d'eau dans mon jardin.

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Quentin écrit :

@Le Hollandais Volant : A la différence que la température à laquelle l'eau gèle change avec la pression, alors que les 3,98°C sont fixe.

Aussi, la géothermie peut difficilement chauffer l'eau d'un lac ; au fond de la fosse des Mariannes (11km tout de même) l'eau est aussi à 4°C, il faut des conditions spéciales pour récupérer beaucoup d'énergie de la terre (en générale la proximité avec de la lave).

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Inferny écrit :

@Le Hollandais Volant :


Effectivement j'avais pas penser au glaçon ^^ , j'aurais penser qu'avec la pression les molécules n'aurait plus trop de choix de mouvement et du coup abaisserait la temperature de fusion .

Merci de la réponse :) !

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Nagumo écrit :

Tiens, c'était justement l'une des interrogations du héros de Salinger dans L'Attrape-coeurs... En tout cas, merci pour les explications !

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Le Hollandais Volant écrit :

@Quentin : ah oui, pas faux… Et de toute façon l’eau chaude monte laissant la place à l’eau froide, chuis con…



@Sylvhem :
@Nagumo :
Ok, donc ma phrase « C’est la question que personne ne se pose » est fausse XD.

@Janus24 : oui, tu as raison… Je me suis trompé…

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Mescanefeux écrit :


atteignant leur maximum de densité à la solidification



je ne comprend pas... si c'était le cas, les glaçons ne flotteraient pas dans mon pastis, non ?

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Dado écrit :

@Le Hollandais Volant :

Quelques éléments de réponse à propos de "pourquoi l'eau gèle à 0°C et pas à 12°C ? parce que c'est comme ça." Ce n'est pas parce que c'est comme ça... c'est parce qu'il en a été choisi ainsi ! Nuance ;)

En effet, le Comité international des poids et mesures à décrété en 1948 que l'échelle température Celsius (nom donné en honneur de l'inventeur d'une des premières échelles centigrades de température) devait être définie en fonction d'un point : celui de fusion de l’eau au niveau de la mer. Ils ont alors décidé de caler la valeur 0°C de cette nouvelle échelle sur ce point de transformation.

À titre de comparaison, l'échelle Fahrenheit a été initialement définie par D. G. Fahrenheit, en 1724, selon deux valeurs de référence : la température la plus basse constatée à Danzig (la ville natale de Fahrenheit) et la température plus haute, celle du sang d'un cheval. Pourquoi la température du sang d'un cheval ? Je n'en sais rien. En tout cas, depuis il y a eu des réajustements.

Un dernier exemple : l'échelle de température centigrade (que j'ai évoqué tout à l'heure), inventée par A. Celsius en 1742, est définie en fonction de deux valeurs : 0 la température de fusion et 100 la température d'ébullition (le tout au niveau de la mer). De ce fait, elle est légèrement différente de l'échelle qui porte son nom... paradoxal, non ?

Bref, tout ça pour dire que rien n'est absolu et que tout est discutable. La science est avant tout une histoire d'êtres humains qui voient le monde de différentes manières, qui parfois arrivent aux mêmes conclusions... ou pas !

Signé : un chercheur mou :p

P.S. : L'histoire de l'échelle des températures montre aussi que pour un même phénomène, différentes façons de se le représenter existent et que au final elles sont toutes défendables. Même le choix du repère de la température du sang de cheval doit avoir un sens... en replaçant le raisonnement dans le contexte de l'époque je pense que l'on pourrait comprendre les motivations de Fahrenheit.

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Dado écrit :

Désolé pour les coquilles, j'ai écrit le commentaire sans me relire...

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GoustiFruit écrit :

@Le Hollandais Volant : Merci pour le lien vers l'article ébullition/évaporation... Je n'ai toujours pas tout compris mébon :-\ (Ex: pourquoi ça marche avec l'eau, et pourquoi pas avec l'huile ou un autre liquide: taille/masse des molécules ?)

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Le Hollandais Volant écrit :

@GoustiFruit : l’évaporation ? Ça marche avec tous les liquides, y compris l’huile, l’essence, le mercure…
L’air à pression P peut seulement contenir une certaine proportion de chaque vapeur (d’eau, d’essence, d’huile…) avant que cette vapeur se liquéfie sur les parois. Tant que cette proportion n’est pas atteinte, de la vapeur continuera de décoller de la surface et d’envahir l’air.

Si tu parlais de la densité maximale de l’eau à 3,98°C et non 0°C, alors là c’est une propriété de l’eau. D’où cela vient, je ne sais pas vraiment, sûrement de la molécule d’eau elle-même : taille, dimensions, moment dipolaire…

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thib écrit :

@Dado :


Même le choix du repère de la température du sang de cheval doit avoir un sens... en replaçant le raisonnement dans le contexte de l'époque je pense que l'on pourrait comprendre les motivations de Fahrenheit.

J'ai cherché des infos sur cette curieuse valeur de référence, sans rien trouver d'intéressant. J'imagine que c'est du même ordre que le "cheval" utilisé comme unité de puissance.

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Sylvhem écrit :

@thib : Que l'on ai utilisé le cheval comme unité de puissance, ça me semble logique et naturel, vu que ce fut pendant longtemps le seul « moteur » dont a disposé l'Homme. Quelque chose qui a une puissance de deux chevaux, peut par exemple tirer quelque chose qui nécessiterait l'intervention de deux animaux, etc...
Pour la température du sang de cheval ça me semble moins évident. Pourquoi ne pas avoir utilisé la température de sang humain par exemple ? Je suppose qu'il y a une bonne raison, mais j'avoue être intrigué.

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Pyo écrit :

Je m'endormirai moins bête ce soir ! Merci ! ;)

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Le Hollandais Volant écrit :

@Dado :
Ah, oui, biensûr ça dépend de l’echelle de température ! Mais moi j’ai lu la question comme « pourquoi la densité maximale de l’eau est-elle atteinte à cette température là, et non au dessus, et pas non plus au dessous ? », indépendamment des échelles.

Par exemple, ici, la densité max est à 3,98% du chemin séparant le point de fusion et le point d’ébulition de l’eau. Pour la nature n’a t-elle pas pris par exemple 50% ?
C’est ça la question que je considère comme « insolvable ».


@Sylvhem :
Si l’on en croit le Wiki US : https://en.wikipedia.org/wiki/Fahrenheit
Fahrenheit utilisa bien la température du sang humain (peut-être avait-il de la fièvre ce jour là ?), et pas du cheval. Les deux sont toutefois très proches :

Je cite une lettre de M. Fahrenheit : « The third point is situated at the 96th degree. Alcohol expands up to this point when it is held in the mouth or under the armpit of a living man in good health until it has completely acquired his body heat. »

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Dado écrit :

@Le Hollandais Volant :

Vu les sources du Wiki US et la lettre que tu cites je crois que je vais devoir revoir mon histoire du cheval... dommage j'aimais bien. Elle est répandue pourtant, c'est fou comment on finit par croire des choses à force de les entendre répétées... d'ailleurs Wiki FR va devoir revoir son article je pense.
Bon, au moins ce point est réglé : c'est vrai que l'usage de la température humaine fait plus de sens.

Du coup j'avais interprété la question différemment. Le problème que tu as reformulé est effectivement plus complexe ! (Je suppose que les % c'est en fait des °C ?)

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Sylvhem écrit :

@Le Hollandais Volant : Ah, merci Timo, ça me semblait assez étrange comme histoire :).

De toute façon, pourquoi se compliquer la vie ? Les vrais scientifiques n'utilisent que le Kelvin et l'échelle SI :P.

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Le Hollandais Volant écrit :

@Dado : non, ce sont bien des pour cent (%).

@Sylvhem : des Kelvin ? Diantre ! J’utilise l’échelle Réaumur, moi, monsieur !

« L'échelle Réaumur est une échelle de température conçue en 1731 par le physicien et inventeur français René-Antoine Ferchault de Réaumur (1683-1757), qui a défini son thermomètre à partir de la dilatation apparente de l'alcool et en calibrant un intervalle de référence entre le point de congélation de l'eau (valeur : zéro) et le point d'ébullition de l'eau (valeur 80). »

Sinon y’a l’échelle Delisle qui m’a l’air sympatique aussi, en tout cas la page Wiki m’a un peu fait sourire :

« Les thermomètres Delisle comptaient en général 2 400 graduations, ce qui était approprié pour les hivers de Saint-Pétersbourg. »

J’imagine le mec compter les graduations sur son thermomètre « …1256, 1257, 1258, heu… Mince, je suis perdu… Je recommence : 1, 2, 3, 4… »
/me sort…

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Sylvhem écrit :

@Le Hollandais Volant : L'échelle Réaumur rien que ça ! En tout cas, merci pour le lien vers la page de l'échelle Delisle, je ne ne la connaissais pas et ça m'a bien fait sourire également ^^.


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